lundi 24 août 2009

Les funérailles japonaises.

Nous y voilà.
Attention, je ne prétends pas que ça se passe toujours comme ça, ça dépend un peu de la religion de la famille.

Alors d'abord, tu commences par la veillée de 2 jours, dont le premier avec le cercueil chez toi. Ouais, je sais, un macchabé dans la maison par 35°C, ça te paraît pas être l'illustration du bon sens, mais en fait ça pue pas, ils ont dû mettre des trucs dedans, un peu comme pour les momies. D'ailleurs l'analogie ne s'arrête pas là, vu que le cercueil c'est pas un truc en bois tout sobre qui ressemble à la boîte de ton vibro Mylène Farmer, mais un coffre magnifiquement orné d'un tissu avec des motifs en dorures, que même Toutânkhamon il est jaloux.
Et puis une petite fenêtre pour voir le visage du mort, hein, des fois que tu aurais des souvenirs de lui en bonne santé, là comme ça t'es sûr d'avoir une dernière image bien glauque...

Le deuxième jour de la veillée, ça se passe dans une salle de réception (en général d'un grand établissement prévu pour ça), because c'est là que se tient la première cérémonie.
Alors le matin les mecs viennent chercher le cercueil, et si t'es Robert Patrick t'as la chance de le porter jusqu'au corbillard, comme dans les films américains sur la mafia, et tout.
Là, les mecs ils ont le brancard et le rail ad hoc pour faire glisser le cercueil dans la voiture et roule !
Et toi, t'a plus qu'à te rendre à la cérémonie par tes propres moyens.

Arrivé sur place, t'hallucines : le cercueil est déposé devant un parterre de fleurs qui doit faire 8 mètres de large sur 3 de profondeur, et tout ça a coûté le prix d'environ 300 Final Fantasy XII.
Toi tu fais un peu tâche, parce que t'es pas Clarence Boddicker, donc t'as pas de costard "spécial enterrement" qui ferait que les 3 nanas de moins de 80 ans présentes dans la salle se pâmeraient devant ta classe française. Et pas possible d'y aller non plus avec mon costume de Casshern, tu penses...
Ah oui, parce que pour la cérémonie, il y a une tenue de rigueur, et tout le monde est sapé pareil :


Collier de perles quasi-obligatoire pour les nanas (sans doute pour rappeler le motif du chapelet).
Alors fatalously, tu te retrouves le seul Blanc, EN PLUS dans les 4 ou 5 places accordées à la famille du défunt, bref, on ne voit que toi et tu sens lentement monter la tension, la pression, l'impression d'oppression quand vient le moment de la récitation (de sûtras).
Parce qu'il y a un moine qui vient et qui chante un sûtra, et FORCÉMENT, le mec a pas commencé depuis 10 secondes que déjà tu as ça dans la tête et une envie de te bidonner difficile à contenir. Donc tu gamannes à donf'.

Ensuite tu passes devant un meuble avec de l'encens et tu déposes des graines sur des charbons ardents.

Après tu salues tout monde, tu manges 2-3 sushis et tu vas dormir, normalement sur place (c'est une veillée, hein, donc c'est un peu le principe), mais comme t'es arrivé en avion le matin même, tu vas dormir dans une vraie maison, histoire d'être en forme pour la vraie cérémonie funéraire du lendemain.

La cérémonie funéraire, donc (c'est là qu'il faut pleurer pour de vrai).

La première partie ressemble beaucoup à celle de la veille (c'était une répèt', alors ?), sauf que là on a mis les petits plats dans les grands : il y a une pianiste qui joue pendant quasiment toute la cérémonie, et elle, t'as pigé que les enterrements elle fait ça par vocation, quoi : elle a une gueule de nana qu'a oublié à quoi ça pouvait servir de sourire. Elle est pas très très laide, juste quelconque, mais une quelconcité morne, genre elle va pas se toucher devant les érotiques d'M6, tu vois (ne ris pas, je connais des filles qui font ça, I swear). Genre plus morte que le mort, je sais pas, peut-être c'est fait exprès pour remonter le moral de la famille en deuil, avec le contraste...
Et avec ça une maîtresse de cérémonie qui refait la même annonce que la veille (genre elle te résume la vie du défunt, des fois que tu serais présent à l'enterrement par hasard. Quand tu sais ce que ça coûte d'être invité à un enterrement...), mais qui aura un rôle bien plus important dans 5 minutes.

Tu te souviens du meuble avec les charbons ardents et dessus on met des graines ? Eh ben cette fois-ci, c'est pas la famille qui y va, c'est TOUS LES AUTRES, présentés par la maîtresse de cérémonie (et là t'as un peu l'impression d'être devant le générique de ton émission de télé qui te présente ses sponsors), et la famille du défunt reste debout à côté du meuble et fait des courbettes devant chaque groupe. Amis du lumbago, bonsoir.

Le moine refait une récitation de sûtra, on fait un speech, on prend une photo de famille, puis on ouvre le cercueil et tout le monde dépose des fleurs ou des objets pour le défunt, on lui touche le visage (WTF ?!), on lui prélève quelques rognures d'ongles qu'on placera dans le o mamori de l'année, et puis après on referme le cercueil et on se dirige vers le crématorium : le corbillard devant et un minibus pour la famille derrière.

On entre maintenant dans le domaine exclusif de la famille plus ou moins proche : la crémation.

Toujours super équipés, les mecs placent un rail devant le four et font glisser le cercueil sur une plaque en terre refractaire (ça sent les ateliers de poterie), ils referment la porte (y a 9 portes les unes à côté des autres, donc on est clairement dans la crémation industrielle, hein, les mecs ils font ça toute la journée, tous les jours de la semaine).
La crémation prend environ 1h30, pendant laquelle on t'accompagne dans un autre bâtiment où tu peux manger et boire à volonté. Ça tombe bien, j'ai faim.

Au sortir de cette petite collation, tu retournes au crématorium où on ouvre le four pour te présenter... le squelette du défunt. Et là tu comprends pourquoi la crémation dure 1h30 alors que ça pourrait très bien mettre 15 minutes pour peu qu'on joue avec le thermostat façon Spinal Tap : si on chauffe pas trop exprès, c'est pour conserver le squelette.

Oh, il en reste pas grand'chose, hein : le crâne et deux-trois os longs. Et puis te plains pas, les mecs à côté il leur en reste encore moins (LOL !).

Et qu'est-ce qu'on en fait, de ce squelette ? Eh ben les employés ils arrivent avec des baguettes et ils explosent le crâne, qui fait un bruit de meringue, donc, et ils placent certains os dans un récipient (surtout un, super important, mais j'ai oublié le nom et j'ai la flemme de chercher).
Là-dessus, les membres de la familles vont devoir, deux par deux, saisir ces os avec des baguettes (pas la peine de dire que toi t'as l'habitude de manger avec une fourchette et un couteau, hein, ils vont pas changer les couverts exprès pour ta gueule) et les placer dans 2 boîtes en bois ad hoc : une grande pour les os "normaux", et une petite pour l'os spécial.
Bien évidemment, tu seras gentil de pas foirer ton coup en faisant tomber ton morceau d'os.

Après ça tout le monde retourne à l'hôtel de la cérémonie, pour une dernière récitation de sûtra où t'es pas du tout assis comme avant, mais en seiza et tu souffres ta race, ainsi qu'une collation prestigieuse, et puis, enfin, tu rentres chez toi et les mecs qui ont géré l'enterrement t'apportent les gros bouquets de fleurs qu'il y avait à la cérémonie, avec aussi des posters du défunt, des fois que t'aurais envie d'en tapisser ta maison (WTF ?!).

Et là le calvaire (et Hobbes) commence : les fleurs tu dois t'en occuper, et bien sûr ces connards ont choisi des lys.
Alors Robert Patrick t'en apprend une bien bonne sur les lys : c'est une fleur blindée d'un pollen marron qui s'envole au moindre coup de vent et QUI NE PART PAS AU LAVAGE ni sur la peau, ni sur les vêtements.
Donc ta visite quotidienne à l'autel du défunt (chez toi) au milieu des lys, tu la fais dans un imperméable acheté au 100¥ shop du coin (par 35°C, tu jouis ta race) si tu veux pas flinguer ta nouvelle collection de T-shirts UNIQLO...

Tu comprendras que je suis pas super pressé de perdre un autre membre de ma famille Japonaise...

vendredi 7 août 2009

L'été japonais.

L'été japonais est invivable.
D'ailleurs j'y étais pour un enterrement, histoire de prendre une longueur d'avance avec un petit topo sur les funérailles japonaises : c'est pas sur un blog touristique qu'on te racontera comment un crâne qu'on éclate après crémation, ça fait un bruit de meringue...

D'abord, l'été japonais fait que tu pues tellement ta sueur que t'as l'impression que c'est l'odeur d'un autre.

Ensuite, tout ce qu'on vous raconte ailleurs est faux : l'été japonais, ce n'est pas la saison des feux d'artifice. Ne dis pas "si", connard, sur 3 mois à 40°C on te balance 3 feux d'artifices et ça y est, tu t'es cru à la parade de Disneyland ?!

L'été japonais, c'est la saison des mariages et de la bière. Comment je le sais ? Ben j'ai regardé la télé.

PAS une plage publicitaire, PAS UNE, t'entends, où on te balance pas minimum 3 spots pour la bière, d'autant que depuis que Kirin et Suntory ont fusionné, la bière à la télé, c'est un peu comme Sarkozy sur TF1, tu vois.

L'autre plaie télévisuelle, c'est les mariages. Des pubs gravement pompées sur la vidéo d'une grognasse qui vole, avec les pétales de roses partout, pour un pays qui a décapité près de 40.000 chrétiens à Shimabara, je trouve le retournement de veste assez balaise.
Pubs évidemment à destination des femmes, vu que le mariage (et le divorce) c'est plutôt dans leur intérêt à elles. Cette conne d'Edith Cresson a raté le prix Nobel de socio en traitant les Japonais de fourmis sans aller au bout de sa comparaison. Elle avait pourtant mis le doigt dessus : les mâles bossent sans relâche pour nourrir la Reine et sa descendance. Au lieu de se faire défoncer par tout le monde, elle aurait eu droit aux mêmes égards que le père Roland Barthes, c'est ballot.
C'est ça votre problème, les gonzesses : vous avez tout plein d'intuition, mais aucune méthode.

Dès que j'ai fini de rien foutre de mes journées, je vous explique comment c'est de mourir au Japon...
 
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