samedi 17 août 2013

Et l'amour, enculé ? (part.3)

En ce moment, je tombe d'amour en amour, alors je te fais partager.
D'abord il y a ce jeune Polonais qui a juste un talent de ouf, Jakub Żytecki, j'écoute son Message from Atlantis en boucle depuis quelques temps, y compris pendant la rédaction de cet article et du précédent.
 
Et puis hier soir j'ai enfin pris le temps de lire mes 2 tomes de The Voynich Hotel, et ça a été un putain de coup de foudre.

Mais puisqu'on va parler de mangasses, je te fais partager un autre coup de cœur, plus ancien.

1) AIKI


J'espère déjà que le nom de l'auteur ne t'est pas inconnu, ISUTOSHI étant le mec à l'origine d'un des mangas érotiques les plus excitants et bien foutus qui soient : Slut Girl.



Dès Slut Girl, "tostaki", comme dirait l'autre : un mélange minutieusement dosé d'humour, d'érotisme, de sexe, de scénario un peu plus fini que "mon mari ne me touche plus alors je baise avec mon adolescent qui reste à la maison", le tout emballé dans une qualité graphique exceptionnelle, et plus particulièrement une gestion des cadres donnant toujours la priorité à la lisibilité de l'action, attention malheureusement minoritaire dans le monde du manga porno, voire du manga tout court.


Eh ben AIKI, c'est la même.


Manga de combat shônen-style avec les ingrédients habituels : des techniques secrètes, des adversaires toujours plus balaises, des arts martiaux traditionnels dont t'as jamais entendu parler, etc.

Oui, mais y a des seins, des fesses, du sexe, et un humour typique de Dr.Slump, et Dieu sait si on aime Dr.Slump.


Ajoutons que le "héros" est dépourvu du moindre sens moral et se bat le moins possible, préférant le rôle du prof qui explique à ses élèves ce qu'il ferait s'il était à leur place.

Si certaines productions d'ISUTOSHI ne sont pas inoubliables, AIKI est un manga qui tient vraiment la route, grâce à une qualité graphique constante (on n'est pas chez Togashi et ses pages torchées dans le métro le jour de la deadline) et un scénario cohérent dans son évolution. On regrettera cependant une publication un peu lente...



2) The Voynich Hotel


Déjà, comment rester insensible à cette couverture ? Les visages qui rappellent certains travaux de Tim Burton, l'angularité des lignes, la fusion des surfaces, juste je kiffe.


Mais attention : manga précieux.

Une mise en scène qui ne sera pas sans rappeler "Les Faux-Monnayeurs" d'André Gide à ceux qui l'ont lu, donc des scénettes en apparence sans lien direct, mais qui s'entrelacent pour te faire tomber la mâchoire et apprécier le nombre de coups d'avance de l'auteur.


Le charme de ce manga tient autant à son scénario bien ficelé qu'à son humour omniprésent à base de références populaires, à son style graphique épuré mais consistant, et surtout à la qualité d'écriture de ses dialogues : il fait partie de ces mangas que je qualifie de jôhin (上品), pouvant être appréciés par un public ne se reconnaissant pas d'attirance pour le support en général, particulièrement pour les mangas de style shônen. On peut mentionner dans cette catégorie Jojo no kimyô na bôken et Rurôni Kenshin, qui explorent quelque chose de bien plus profond que des successions de combats. En revanche, je ne place pas Hokuto no Ken dans les mangas de ce type : malgré les multiples interprétations qu'il suscite sur le rôle de la violence et de la fratrie – ce qui n'est pas sans faire écho aux œuvres de Tsukamoto Shinya –, on ne peut pas dire que Hokuto no Ken est "bien écrit", faut pas pousser.

L'autre aspect appréciable de TVH, c'est l'omniprésence d'une sexualité qui ne tombe jamais dans le vulgaire et reste plutôt cantonnée dans l'humour, ou est exploitée comme vecteur de quelque chose de plus sentimental, la sentimentalité elle-même perspirant de quasiment tous les personnages.



Enfin, le manga mélange agréablement et assez naturellement meurtres plus ou moins sordides, enquête policière, surnaturel et romance, avec des seconds rôles attachants, même sur courte distance.

J'ai juste UN PEU HÂTE qu'ils sortent le troisième tome, bordel !

jeudi 15 août 2013

Cinéma de quartier (3).


On m'a donc invité à aller voir le dernier Hayao Miyazaki, "Le vent se lève" (ce serait amusant qu'ils aient le culot de trouver un autre titre en français, vu qu'il s'agit d'une citation de Paul Valéry).

Moi, Miyazaki, je suis pas trop fan. Ce côté cul-cul la praline m'énerve un peu, et puis dans la série "je suis tellement un fan de Walt Disney que j'utilise la même astuce des mêmes scènes copier-coller qu'eux", bon.
Mais j'allais pas mettre un vent (oh oh) à la demoiselle qui semblait particulièrement encline à ce que je l'accompagne, non pas pour de basses raisons sexuelles, sots, mais parce qu'elle crevait visiblement d'envie de voir ce film et qu'elle avait probablement personne pour l'accompagner en semaine. Tiens, d'ailleurs ça me donne l'occasion de t'expliquer comment marchent les invitations au cinéma au Japon, que tu sois pas dokidoki pour rien :

1) c'est toi qui invite une fille. Si elle veut ta bite, elle dit oui et vous y allez ensemble, rien que tous les deux. Si elle dit oui mais qu'elle ramène une copine, voire des copines, qu'elle te sort un plan "ouais, bonne idée, allons TOUS ENSEMBLE au cinéma", dead giveaway : elle veut pas ta bite. Si elle te trouve carrément creepy, elle te dira juste que ça va pas être possible, parce qu'elle a pas le temps.

2) C'est une fille qui t'invite. Elle veut juste un pigeon pour l'accompagner, parce qu'aller toute seule au cinéma, c'est hazukashii. La fille qui veut ta bite t'invite pas au cinéma en journée, elle t'invite le soir pour se donner l'occasion d'être bourrée avant d'être bourrée.
On s'est bien compris.

Bon, mais là j'avais un peu checké le casting, et QUELLE NE FUT PAS MA SURPRISE de voir que le gars qui double le héros, ben c'est juste notre père à tous : Anno Hideaki.
Du coup ma motivation s'en trouva considérablement augmentée et je partai donc chaleureusement disposé.

Nous sommes allés au Toho Cinemas de Roppongi et c'était juste BLINDÉ DE BONNASSES ! Mon accompagnatrice étant pas la plus belle femme du monde non plus (si j'y étais allé avec Risa je te l'aurais dit, tu penses), je me retenais de pas mater partout comme à mon habitude, mais c'était hardcore. Un truc de ouf.

Du coup, petit moment colère, quand même : toutes ces putes qui te regardent de haut quand tu mentionnes que t'es pas complètement réfractaire à l'animation japonaise, que même si t'es un ikemen elles te pardonnent pas ce rapport à la 2D, ben là, comme par hasard, elles vont s'entasser devant un Miyazaki.
La même mentalité de trou-de-balle que chez Télérama, à chier sur une production dont ils ignorent quasiment tout, puis à ramper devant Miyazaki pour lui tailler des pipes, puisque les références à Disney sont suffisamment explicites, alors là, ça va, on est en terrain connu. À vomir.


Mais si tu pensais que Robert Patrick dit du mal du Japon, attention, le père Miyazaki mérite complètement son titre de Maître Quenellier : qu'est-ce qu'il leur met dans la gueule, aux Japonais !

À un moment, que nous situerons au début des années 40, Jirô (le héros) et son collègue avionneur sont en Allemagne, en extase devant un PUTAIN DE RADIATEUR, tellement avec un truc aussi con qu'un radiateur ta chambre est chauffée correctement. Et d'avouer, penauds : "Nous les Japonais, on est trop des merdes, on a 20 ans de retard sur la technologie occidentale, on en est encore au kotatsu pour se chauffer".
Ah ouais ? Et en 2013, vous en êtes où ?

L'autre quenelle du film, c'est évidemment la relation amoureuse du héros avec sa femme. C'est-à-dire une relation avec DE L'AMOUR, de l'amour qui se voit, du "je-prends-soin-de-toi", que toutes les Japonaises de la salle en ont eu une descente d'ovaires tellement on était loin du type de relation qu'elles entretiennent avec leur salaryman autiste. Ça vous apprendra à placer vos ambitions de merde avant vos sentiments, tas de larves.

Et puis à la fin, bien sûr, c'est à peine triste (À PEINE, hein !), donc ça reniflait de larmes dans toute la salle.
Vous chialez devant un Miyazaki, sérieusement ? SÉRIEUSEMENT ? Comment est-ce que vous allez gérer devant un CLANNAD+After Story ?

Moi qui suis pas le dernier à chialer devant un dessin animé, si tu savais comme j'ai ri.



Mec, si tu veux me faire chialer, déjà tu prends des mecs un peu plus doués que Hisaishi Joe pour faire tes musiques (au hasard : Iwasaki Taku), et puis surtout tu évites de dessiner tes gamines qui chialent avec une tête de bouledogue, vu que si Aranxta Sanchez était un symbole fédérateur d'empathie, ça se saurait.

Alors sinon sur le film lui-même, dont tout le monde te dira que c'est "plus adulte" (on y voit DES ADULTES FUMER DES CIGARETTES, ce putain de scandale), on retrouve les lubbies du patron :
- les avions, les trains, la mécanique en général.
- l'animisme qui fait une apparition discrète au début du film. Tu te dis "oh cool, tout part en couilles", mais en fait non, c'est juste un éclair de génie et une scène qui bute, mais ça relève plus du clin d'œil à l'univers miyazakiste qu'autre chose.
- le dessin sacrifié à l'animation, donc d'un côté des scènes avec des dizaines de plans les uns dans les autres, des dizaines de personnages qui s'entrelacent, la vie qui grouille, quoi, et d'un autre côté un bête copier-coller d'un même visage sur 3 ou 5 persos de la même scène, mais genre on a pris des dessinateurs corses, quoi. Limite impardonnable quand tu vois le niveau global du film.

Enfin, sur le thème lui-même, Miyazaki sera-t-il soupçonné d'antisémitisme parce que son film présente l'inventeur des Zero-sen comme un être humain à la poursuite de ses rêves ?
Le film sera-t-il interdit de projection en Chine ?
Nous étonnerons-nous de voir Mitsubishi parmi les sponsors ?
L'avenir nous le dira, mais tu l'auras lu ici en premier.
 
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